CHAMBERS, Charles (ca. 1812-1837)

Biographie
Né vers 1812, probablement dans la région de Montréal, Charles Chambers est le fils de Frederick Chambers, cordonnier, et de Marie Wagner. Ses parents sont peut-être d’origine allemande; il est vraisemblablement de religion anglicane. Sa parenté avec le futur maire de Québec, Robert Chambers, évoquée par certains auteurs, est peu probable.

Charpentier et menuisier de profession, parfois marchand de bois, Chambers semble néanmoins assez bien éduqué, si on peut en juger par sa signature.

Dès le début des années 1830, Chambers est assez bien connu de la justice, par son implication dans différents crimes mineurs. Vers le milieu des années 1830, il se trouve à la tête d’un petit group de criminels, la « Bande à Chambers », qui pratique divers vols spectaculaires dans la région de Québec, au grand désarroi de la population. Entre autres, un vol à Lotbinière mène au décès de la victime, Louis Sivrac, et un autre dérobe la chapelle de la Congrégation à Québec (l’actuelle chapelle des Jésuites).

Incarcéré dans la prison commune de Québec une première fois en 1835, Chambers fait face à quatre accusations différentes. Il réussit à éviter toute condamnation et est relâché. L’année suivante, il est arrêté de nouveau avec son complice, Nicolas Mathieu, pour avoir cambriolé la maison de Mary Ross, veuve Montgomery. Cette fois, un autre des anciens complices de Chambers témoigne contre eux et ils sont trouvés coupables. Selon le droit criminel alors en vigueur, le juge en chef, Jonathan Sewell, n’a d’autre choix que de les condamner à mort. Comme il est habituel dans de tels cas, Chambers et Mathieu montent tous les deux des pétitions pour demander au gouverneur Gosford de les gracier. Après sa sentence, Chambers aurait feint sa conversion au catholicisme. Sa pétition est donc signée par des douzaines de résidents francophones catholiques de Québec, y compris plusieurs membres du clergé, dont Charles Chiniquy, futur fer de lance des croisades contre l’alcool au Québec. Suite à une recommandation favorable de la part du Conseil exécutif de la colonie, Gosford commue leur peine en exil à perpétuité dans l’une des colonies pénales de l’Australie.

Chambers quitte Québec en mai 1837, à bord le navire Ceres, en route pour l’Angleterre, d’où il devrait être envoyé en Australie.

Les exploits de Chambers, et ceux de sa bande, sont immortalisés par François-Réal Angers dans un récit sensationnaliste et à moitié inventé, Les révélations du crime ou Cambray et ses complices, publié quelques mois après le départ de Chambers. Le livre est un succès et est réédité à au moins deux reprises, en 1867 et en 1880. Chambers et sa « bande » entrent alors au panthéon des criminels québécois. Leur légende s’amplifie au cours des ans et on leur attribue toute une série de crimes, y compris des meurtres, auxquels ils ne sont pas du tout liés. Même sans ces amplifications, les faits de la vie de Chambers en font une figure extraordinaire de l’histoire du Québec.

Charles Chambers ne parvient jamais en Australie. Il décède à Woolwich en Angleterre, le 14 novembre 1837, en attendant la deuxième étape de son voyage d’exil.

Il avait épousé à Québec en 1834, Julie Gagné, fille de Joseph Gagné, boucher. Elle est morte en 1836.

– Donald Fyson, juin 2015

Images

Signature de Charles Chambers sur la pétition demandant que sa sentence de pendaison soit commuée en exil perpétuel.

Page couverture de l'édition de 1867 du livre d'Angers.

Bibliographie

Études

  • Angers, F. Réal. Les révélations du crime ou Cambray et ses complices: chroniques canadiennes de 1834. Présentation et bibliographie par Gilles Dorion. Québec, Nota bene, 2003.
  • Cambron, Micheline. «Vous avez dit roman? Hybridité générique de nos « premiers romans », L’influence d’un livre et Les révélations du crime». Voix et Images 32(3)(2007), p. 43-57.
  • FYSON, Donald. «Réforme des prisons et société carcérale: la prison de Québec, de 1812 à 1867». Dans Louisa BLAIR, Patrick DONOVAN et Donald FYSON, Des barreaux de fer aux étagères: une histoire du Morrin Centre (Québec, Septentrion, 2015) (à paraitre).
  • LAPOINTE, Vicky. «La petite histoire du crime: la bande à Chambers» (2010). Billet en six parties, à titres variables, dont la première se trouve à <https://tolkien2008.wordpress.com/2010/04/28/la-petite-histoire-du-crime-la-bande-a-chambers-quebec-et-sa-region-1831-1835/>.
  • ROY, Pierre-Georges. Les petites choses de notre histoire. Septième série. Lévis, Éditions Garneau, 1944. <http://www.ourroots.ca/toc.aspx?id=3323>

Sources

  • ANGERS, F.R. Les révélations du crime ou Cambray et ses complices: chroniques canadiennes de 1834. Québec: Fréchette, 1837. <https://archive.org/details/cihm_21603>
  • Bibliothèque et Archives nationales du Québec, «Le fichier des prisonniers des prisons de Québec au 19e siècle», <http://www.banq.qc.ca/archives/genealogie_histoire_familiale/ressources/bd/‌instr_prisons/prisonniers/index.html> (transcription des registres de la prison commune de Québec, BAnQ-Q E17,S1).
  • Bibliothèque et Archives nationales du Québec, «Documents judiciaires concernant Charles Chambers et Nicolas Mathieu», P1000,S3,D2217. <http://pistard.banq.qc.ca:7777/unite_chercheurs/‌description_fonds?p_anqsid=20150526082934330&p_centre=03Q&p_classe=P&p_fonds=1000&p_numunide=3879>
  • Quebec Mercury, 28 mars, 30 mars, 1er avril et 11 avril 1837. <http://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/‌1875218>